Dans quelles mesures la notion d’« art dégénéré » sous le régime nazi trouve-t-elle un écho dans les formes contemporaines de censure artistique et quels en sont les effets sur la liberté artistique?
L'exposition actuelle au musée Picasso sur "l'art dégénéré" met en lumière la volonté idéologique de contrôle culturel et artistique sous le régime nazi.
L'art a toujours été un terrain d'expression pour les idées, les émotions et les contestations sociales. Pourtant, il peut être un objet de contrôle et de répression. Sous le régime nazi, le concept d'« art dégénéré » a été utilisé pour désigner toute forme artistique qui s'écartait de l'idéologie officielle et des normes raciales du régime.
Aujourd'hui, dans de nombreuses sociétés, qu'elles soient démocratiques ou autoritaires, l'art continue d'être soumis à diverses formes de censure, parfois subtiles. La question qui se pose alors est de savoir dans quelles mesures la notion d'« art dégénéré » trouve t- elle un écho dans les formes contemporaines de censure artistique, et quels en sont les effets sur la liberté artistique?
Plan:
En première partie, je décrirai comment le régime nazi a imposé sa vision de l'art pour imposer son contrôle idéologique
En deuxième partie, j'exposerai les divers formes contemporaines de censure artistique
En troisième partie, j'expliquerai comment les artistes contemporains interagissent avec la liberté de création
Plan mental :
I. L'art dégénéré sous le régime nazi: un modèle de censure étatique et idéologique
A. Instrumentalisation nazie de l'art
-Définition de "l'art dégénéré"
-Propagande Nazie
B. Les méthodes de répression
-Confiscation/destruction
-Persécution/humiliation
- Purge nazie
II. La censure contemporaine: nouvelles formes et nouveaux enjeux
A. Censure étatique dans les pays totalitaires
B. Censure dans les pays démocratiques
-Judiciaire
-morale
-religieuse
-sociale : cancel culture
-économique
III. Les effets de la censure contemporaines sur la liberté artistique
A. Polarisation des débats
B. L'auto censure des artistes
-menaces physiques
-menaces professionnelles ou économiques
C. Stratégie de contournement, résistance et conte mouvements
-anonymat
-espaces alternatifs
-collectifs
-effet Steisand
-artivisme
1ère partie
I. L’"art dégénéré" sous le régime nazi : un exemple de censure étatique et idéologique
Le 19 juillet 1937, l’exposition "L’Art dégénéré", ou ”Entartete kunft” en allemand, est inaugurée à Munich. Gratuite et itinérante, elle circule durant quatre années dans toutes les grandes villes d’Allemagne et d’Autriche, et est fréquentée par près de 3 millions de visiteurs. Près de 700 œuvres appartenant l’art moderne sont décrochées des musées allemands, pour être exhibées comme les symptômes d’un art malade, des œuvres appartenant à l'expressionnisme, le cubisme, le surréalisme, l’art abstrait, ou encore l’art juif ou bolchévique, ou plus principalement, ce terme est appliqué aux avant-gardes artistiques du début du XXe siècle. Les œuvres sont présentées de façon chaotique, accompagnées de commentaires moqueurs ou choquants. L’objectif est clair, dénigrer les artistes modernes et convaincre le public que leur art est une menace pour les valeurs allemandes afin de renforcer la politique de censure.
Cette « exposition de la honte » sert en réalité de contre-modèle à une autre exposition à la Maison des arts, l’exposition officielle des "purs chefs-d’œuvre de l’art allemand" selon l'idéologie qui met en avant la pureté esthétique.
Le terme « art dégénéré » a été popularisé par les nazis dans les années 1930 pour désigner les œuvres contraires à leur idéologie. Considéré comme décadent ou corrompu, cet art était même moqué et exposé publiquement dans la rue pour être ridiculisé comme le tableau de Marc Chagall où figure un rabbin avec une barbe verte et une étoile de David.
L’objectif était de contrôler la culture et de promouvoir un art conforme aux valeurs aryennes : classique, réaliste et héroïque. L’objectif est de purifier la culture allemande selon l’idéologie raciale nazie.
Le régime nazi a lancé une vaste campagne de répression contre l’art moderne, qualifié d’"art dégénéré". Plus de 20 000 œuvres ont été confisquées dans les musées allemands, car jugées contraires aux valeurs nazies. Beaucoup ont été détruites, tandis que d'autres ont été vendues à l’étranger. Cette censure visait à éliminer toute forme d’expression artistique non conforme à l’idéologie du régime.
Mais, en plus de censurer leurs œuvres, le régime nazi persécute de nombreux artistes modernes. Beaucoup ont été contraints à l’exil, interdits d’exercer leur métier, ou déportés s’ils étaient juifs, communistes ou opposés au régime. Cette répression visait à éliminer toute voix opposante et à imposer un art conforme à l’idéologie nazie. Parmi les artistes qualifiés de "dégénérés" il y a Pablo Picasso, Wassily Kandinsky ou encore Marc Chagall et Paul Klee.
Transition : Si le nazisme représente une censure d’État extrême, quelles en sont les formes aujourd’hui ?
2ème partie
II. La censure contemporaine: les nouvelles formes et les nouveaux enjeux
La censure peut être motivée par des raisons politiques, légales, morales, religieuses, sociales ou économique.
Dans de nombreux pays, la censure reste un outil puissant pour limiter l'expression artistique.
La censure étatique de l'art dans les régimes autoritaires est particulièrement sévère, car l'art est souvent perçu comme un moyen puissant de remise en question du pouvoir en place. Dans ces régimes, l'État utilise l'art pour imposer des normes idéologiques et sociales tout en réprimant les formes de créativité qui pourraient constituer une forme de résistance ou de critique.
-En Chine, certaines œuvres critiques envers le gouvernement (comme celles d’Ai Weiwei) sont interdites.
- Russie : Lois contre la « propagande LGBT » dans l’art (ex. emprisonnement de performances contestataires).
Dès son arrivée au pouvoir, Donald Trump a effectivement déclaré "j'ai décidé de licencier ceux qui ne partagent pas notre vision pour un âge d'or des arts et de la culture" . Cette affirmation s'inscrit dans sa volonté de réorienter la culture américaine en s'opposant à ce qu'il qualifie de "wokisme", volonté d'imposer des normes morales ou idéologiques en gommant certaines représentations de la diversité raciale, ou sexuelle.
Dans les pays démocratiques, la censure oscille entre interdictions légales et pressions politiques. Il n'y a pas de censure d’État directe, mais des pressions qui peuvent concerner des œuvres de théâtre, de musique, de cinéma ou de littérature. Les limites de la censure artistiques dans les pays démocratiques sont principalement les limites de la lois. Il existe la censure judiciaire avec procès contre l’artiste ou l’œuvre jugé pour incitation à la haine ou pour diffamation.
Cependant la censure pour atteinte à la morale publique est la plus répandue.
Des œuvres jugées pornographiques ou trop violentes sont retirées d’expositions car jugées “choquantes”.
La justification officielle est souvent une volonté de protéger le public, notamment les mineurs du “contenu offensant”.
Ex: Le tableau "Thérèse rêvant" peint en 1938 par Balthus a fait l'objet d'une pétition pour demander son retrait du Metropolitan Museum en 2017 pour "sexualisation d’une mineure".
Ex : En France, des œuvres ORLAN ont suscité des polémiques et parfois été retirées d’expositions publiques. Ses performances où elle subit des opérations de chirurgie esthétique filmées en direct ont choqué des publics et parfois les organisateurs d’expositions. Ces œuvres, perçues comme “malsaines” ou “insoutenables”, ont été jugées inadaptées à un “lieu public”, notamment s’il accueille des mineurs.
Ex: Aux Etats Unis, le photographe Robert Mapplethorpe explore la sexualité, notamment homosexuelle. En 1989, une exposition de ses œuvres a été annulée à Washington sous pression politique. Il est devenu un symbole de la guerre culturelle sur la liberté artistique.
Enfin, les œuvres jugées blasphématoires et offensantes pour les cultes religieux peuvent amener un vague de censure populaire.
Ex: Affaires des caricatures de Mahomet
Ex: Censure de films : "La dernière tentation du Christ" (1988, Scorsese) a été interdite dans plusieurs pays.
Ex: Piss Christ d’Andres Serrano fait scandale aux États-Unis lors de son exposition en 1989. L’artiste immerge un crucifix acheté chez un antiquaire dans sa propre urine. Il fait l’objet de nombreuses plaintes et de vandalisme lors de son exposition dans plusieurs pays d'Amérique et d’Europe.
On peut dire que globalement les thèmes les plus controversés concernent le corps, la sexualité, et la religion.
La censure sociale que l'on appelle aussi Cancel culture ou culture de l'annulation est le boycott d’œuvres jugées offensantes. Le phénomène a pris de l'ampleur avec l'usage des réseaux sociaux car les polémiques sont relayées rapidement. Lorsqu'une œuvre d'art ou un artiste est jugé publiquement, cela peut mener à la destruction de sa carrière.
L' exemple très connu de Kanye West. Au fil des dernières années, Kanye a fait plusieurs déclarations très controversées, notamment des propos jugés antisémites sur Twitter. Son soutien affiché à Donald Trump et des commentaires minimisant l’esclavage ont choqué une partie de son public.
Plusieurs marques ont rompu leurs contrats avec lui, notamment Adidas, il a été largement critiqué dans les médias et sur les réseaux sociaux, certaines plateformes ont limité sa visibilité ou retiré temporairement ses contenus.
L'exemple de "Tintin au Congo" . Publié en 1931, dans un contexte colonial, Tintin au Congo contient de nombreuses représentations racistes : les Congolais y sont caricaturés de manière stéréotypée et infantilisante, l’œuvre reflète une vision paternaliste du colon blanc, il y a aussi des scènes de violence gratuite envers les animaux, ce qui choque aujourd’hui. Depuis les années 2000, l’album est régulièrement accusé de racisme. Des associations antiracistes ont même demandé son retrait de la vente. Après plusieurs années de procédure, la justice belge a refusé d’interdire l’album, estimant que le contexte historique était clair et que l’intention de nuire n’était pas prouvée. L’album est toujours en vente, mais souvent accompagné d’un avertissement sur le contexte colonial de l’époque. Les éditions récentes incluent parfois une préface explicative.
Ex: En 2021, certains professeurs et élèves ont demandé le retrait de l’auteur Milan Kundera (d’origine tchèque, naturalisé français) d’un programme de littérature, en raison de propos sexistes dans ses œuvres. Bien qu’il n’ait pas été formellement "cancelled", des débats ont éclaté dans les médias et dans l’éducation nationale sur la légitimité d’enseigner ses œuvres à la lumière de ces polémiques.
L'industrie de l'art est de plus en plus influencée par des logiques économiques, où la rentabilité prime souvent sur la liberté d'expression. Les artistes peuvent être contraints de produire des œuvres conformistes, à la recherche d'un public large, ou d'accepter des financements qui limitent leur créativité. L'influence des grandes entreprises et des sponsors peut parfois imposer des contraintes sur ce qui peut être créé ou montré.
Les artistes peuvent subir des pressions commerciales venant de plateformes ou des réseaux sociaux qui ont des algorithmiques de modération et peuvent supprimer des contenus artistiques. Facebook, Instagram et TikTok censurent parfois des œuvres jugées trop explicites comme des tableaux de nus classiques pour "violation des règles de nudité". Ex: Les Demoiselles d’Avignon" de Picasso sur Instagram (2020) Ces censures existent essentiellement pour plaire au plus grand nombre.
Avec l'essor des plateformes en ligne et la collecte de données, la liberté d'expression sur internet devient un enjeu crucial. Les algorithmes de censure, la suppression de contenus jugés inappropriés, ou encore les restrictions d'accès dans certains pays limitent l'expression artistique sur le web.
Enfin, certaines institutions ou musées veulent éviter le boycott des mécènes ou la suppression subventions culturelles, ils refusent certains artistes jugés polémiques, ou retirent des œuvres controversées de leurs salles d'exposition.
Transition : Quels impacts ces censures ont-elles sur la création artistique ?
3ème partie
III. Les effets des censures contemporaines sur la liberté artistique
Les débats sur la représentation des minorités raciales, sexuelles ou de genre dans les films, les séries, la publicité et l'art en général ont fortement divisé l'opinion publique dans de nombreux pays. L’art devient un champ de bataille idéologique en opposant la droite contre la gauche, les religieux contre les laïcs....
La polarisation des débats culturels fait référence à la division croissante de l'opinion publique sur des sujets culturels, sociaux ou artistiques. Ce phénomène peut prendre la forme de tensions entre des groupes qui ont des visions du monde très différentes, souvent exacerbées par les médias et les réseaux sociaux, les politiques gouvernementales ou des mouvements sociaux.
Exemple : Aux États-Unis, la question de la représentation des personnes noires dans le cinéma et la télévision a fait l'objet de vifs débats, en particulier après les mouvements comme Black Lives Matter. Certains considèrent qu’il est essentiel de voir plus de personnages noirs dans des rôles de premier plan, tandis que d'autres estiment que cela pourrait être une forme de "politiquement correst" excessif.
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Le film "Black Panther" (2018), par exemple, a été accueilli de manière très positive par certains, soulignant son importance pour l'identité noire, mais critiqué par d'autres comme une forme de propagande idéologique.
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Autre exemple : La question de l'inclusivité dans les personnages LGBT dans les séries ou les films. Les débats sont souvent polarisés entre ceux qui considèrent que cela est essentiel pour la visibilité des communautés LGBT et ceux qui pensent que cela modifie indûment des œuvres traditionnelles.
Le risque est la division culturelle, certains artistes peuvent être tentés d'uniformiser la création pour plaire au plus grand nombre. En raison de l'intensification des critiques publiques, de nombreux artistes commencent à s'autocensurer par crainte des répercussions professionnelles.
De peur de perdre leur public ou d'être attaqués par des mouvements politiques opposés, les artistes hésitent alors à aborder des sujets sensibles ou polémiques au profit d' idées plus modérées. La montée de la polarisation politique sous Trump a exacerbé ce phénomène.
Selon un rapport publié en 2023, 78% des artistes chinois disent s’autocensurer. Ils ont peur des représailles physiques comme par
Ex: L'artiste chinois Ai Weiwei a été arrêté et détenu sans procès pendant 81 jours en 2011. Il a aussi été battu par la police et sa maison a été mise sous surveillance.
Ceux qui abordent des sujets sensibles comme les droits humains, la politique, ou la religion, peuvent être confrontés à des menaces de violence physique ou de harcèlement. Dans les pays non démocratiques, les artistes, écrivains, journalistes et cinéastes risquent parfois leur vie pour défendre leur liberté artistique.
Face aux différentes formes de censure artistique, les artistes et les collectifs ont mis en place des formes de résistance, des contre-mouvements ou des stratégies de contournement pour continuer à s'exprimer.
Certains artistes optent pour l'anonymat en utilisant un pseudonyme pour échapper à la répression personnel comme Banksy.
Les artistes peuvent contourner les circuits traditionnels par la création d’espaces alternatifs, parfois clandestins. L'Art "hors-les-murs" avec des fresques urbaines, des graffitis, du street art ou encore des lieux autogérés, des festivals indépendants, des galeries militantes ou des usines désaffectées permettent aux artistes de ne pas subir de pressions ni de censure.
Les Collectifs d’artistes engagés permettent de protéger l'individu et ont souvent une plus grande portée symbolique et médiatique.
Exemple : Le collectif Pussy Riot, groupe féministe punk russe, connu pour ses performances artistiques contestataires et ses actions politiques provocatrices contre le gouvernement de Vladimir Poutine et l'Église orthodoxe russe.
Les cas de censure artistique sont souvent relayés massivement en ligne, c'est effet "Streisand", un phénomène où vouloir censurer ou faire disparaître une information... entraîne exactement l'effet inverse : cela attire l’attention du public et renforce sa diffusion.
Le terme vient de Barbara Streisand, célèbre chanteuse et actrice américaine. En 2003, elle a tenté de faire retirer une photo aérienne de sa maison postée sur un site web qui documentait l’érosion des côtes en Californie. Avant sa plainte,quasiment personne n’avait vu la photo. Après la plainte, les médias s’en sont emparés, et des milliers de gens sont allés voir cette fameuse photo. Résultat, la tentative de suppression a eu l'effet strictement opposé à celui recherché.
L' "Artivisme" est également une réponse aux divers censure, le terme "artiviste" est une contraction d'artiste et activiste. Il désigne une personne qui utilise l’art comme moyen d’expression pour dénoncer, questionner ou provoquer une réflexion sur des enjeux sociaux, politiques ou environnementaux.
Un exemple emblématique est le chef-d'œuvre de Pablo Picasso, « Guernica », qui dépeint les horreurs de la guerre civile espagnole. Le tableau symbolise le rejet de la violence et l'engagement pour la paix.
Banksy est l’un des artivistes les plus emblématiques de notre époque. Ses œuvres abordent des sujets comme la guerre, le capitalisme, le racisme, la crise migratoire, la surveillance de masse, ou encore la pauvreté. Il utilise l’espace public comme toile, ce qui permet à un large public d’y accéder librement. Avec un style simple, ironique et souvent humoristique, il fait passer des messages puissants en quelques images seulement.
Les artistes recherchent parfois le scandales médiatiques par des provocations calculées.
Par exemple, l'autodestruction de son œuvre "Girl with Balloon" juste après sa vente aux enchères en 2018 pour critiquer la marchandisation de l'art ou encore "La banane scotchée" de Maurizio Cattelan interroge le système de l’art.
Conclusion
La censure contemporaine n’a pas la même violence que sous le nazisme, elle affiche cependant des mécanismes similaires dans les sociétés autoritaires. L'instrumentalisation de l’art à des fins idéologiques et l'exclusion de certaines formes d’expression au nom d’une « pureté » morale ou politique sont parfois subtiles mais l’art reste un enjeu de pouvoir pour les États.
Si les formes contemporaines de censure artistique se manifestent de manière plus diffuse, elles restent néanmoins préoccupantes. Les pressions politiques, économiques, sociale ou religieuses peuvent pousser la création artistique vers l'autocensure des artistes et l'appauvrissement de la diversité culturelle. De plus, la prolifération des réseaux sociaux, tout en facilitant l'expression libre, a aussi ouvert la voie à des formes de censure numérique, notamment via des actions de modération des contenus jugés inappropriés ou offensants.
En somme, la censure artistique contemporaine, tout en ayant évolué depuis l'époque nazie, demeure un phénomène omniprésent, qui trouve toujours ses racines dans des logiques de contrôle et de pouvoir mais aussi de nos jours dans des logiques de conformité sociale. La liberté artistique dans les sociétés démocratiques reste un enjeu. On peut alors se poser la questions de la limite de la liberté artistique face aux nouvelles sensibilités sociétales?
Vocabulaire clé
propagande
Cancel culture
boycott
blasphème
auto-censure
art subversif
polarisation
"artivisme"
wokisme
Sujets annexes pour les questions orales
liens avec les programmes
1. Quels rôles exerce l'art? Philo
2. La question de la restitution des œuvres
3. c'est quoi la liberté artistique et la liberté d'expression? EMC
4. La liberté artistique à la biennale de Venise
1. Quels rôle exercent l'art?
2. La question de la restitution des œuvres
3. c'est quoi la liberté artistique/liberté d''expression?
La liberté artistique, c'est le droit fondamental de créer, d'exprimer et de diffuser des œuvres sans censure, pression politique, morale, religieuse ou économique. Elle repose sur plusieurs principes clés :
Liberté de création
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Pouvoir explorer tous les sujets, formes et styles (même provocateurs ou subversifs), sans autocensure imposée.
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Exemple : Un peintre choisissant de représenter des thèmes tabous, un écrivain critiquant le pouvoir.
Liberté de diffusion
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Montrer son art au public sans interdiction arbitraire (expositions, publications, spectacles).
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Enjeu : les plateformes (réseaux sociaux, galeries) peuvent aussi limiter cette liberté via leurs règles.
Indépendance face aux pouvoirs
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Résister aux pressions des États (censure), des groupes religieux, des marchés (attentes commerciales) ou des algorithmes (visibilité conditionnée).
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Exemple : Un cinéaste refusant de modifier son film pour plaire à un gouvernement.
Protection des artistes
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Droit à ne pas être emprisonné·e, menacé·e ou discriminé·e pour son art (malheureusement, encore bafoué dans de nombreux pays).
Limites et débats
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La liberté artistique entre parfois en tension avec d’autres droits (respect des minorités, lutte contre la haine).
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Question : Jusqu’où va cette liberté ? Peut-elle tout permettre au nom de l’art ?
En résumé, c’est un pilier des sociétés démocratiques, mais toujours à défendre. Besoin d’exemples concrets ou d’approfondir un aspect ?
4. La Biennale de Venise : un lieu d’expression sans censure ?
La Biennale de Venise est l’un des événements artistiques les plus prestigieux et influents du monde. Elle se veut un espace de liberté artistique, un lieu où les artistes peuvent exprimer des idées politiques, sociales, culturelles et esthétiques sans contraintes formelles de censure directe.
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De nombreux artistes y présentent des œuvres provocantes, militantes, critiques, parfois contre leur propre gouvernement.
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Certains pavillons nationaux sont même explicitement engagés (Palestine, Ukraine, Iran, etc.).
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La Biennale accueille des formes d'art transgressives, dénonçant par exemple :
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les dictatures,
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le capitalisme,
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le racisme,
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les crises migratoires ou écologiques.
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En ce sens, la Biennale favorise la liberté d'expression dans l'espace artistique. Mais en réalité : c’est plus nuancé. Même si la Biennale n’applique pas officiellement de censure, il existe des formes indirectes de contrôle ou d’autocensure.
Pressions politiques dans certains pavillons nationaux
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Chaque pavillon est organisé par l’État ou une institution culturelle nationale.
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Certains pays imposent une ligne politique officielle :
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Des artistes sont évincés ou remplacés s’ils sont trop critiques.
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Des œuvres sont modérées, retirées ou révisées.
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Exemples :
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En 2022, le pavillon russe a été annulé par les artistes eux-mêmes, en opposition à l’invasion de l’Ukraine.
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En 2024, des débats ont eu lieu sur la représentation de l’Iran, de la Palestine, ou d’artistes critiques vis-à-vis de leur propre pays.
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Pressions économiques ou diplomatiques
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La Biennale dépend aussi de soutiens financiers, mécènes et sponsors.
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Certains projets polémiques peuvent être dissuadés ou reformatés pour éviter des tensions avec des partenaires.
Autocensure ou contournement créatif
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Certains artistes choisissent des formes symboliques ou cryptées (cf. cryptage artistique) pour éviter les représailles à leur retour au pays.
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Ce n’est pas une censure imposée, mais une stratégie de protection face à des contextes répressifs.
La Biennale de Venise est l’un des lieux les plus libres d’expression artistique au monde, mais elle n’est pas totalement à l’abri des pressions politiques, diplomatiques ou économiques. L’absence de censure directe ne signifie pas l’absence de contrôle ou d’influences. Les artistes s’adaptent, résistent ou contournent — souvent avec créativité.
Bauhaus
En février 2025, l’extrême-droite allemande remet en question l’héritage du Bauhaus. Fondé en 1919 en Allemagne avant d’être interdit par les nazis, ce mouvement artistique a représenté une révolution pour l’architecture de l’époque. Le député allemand avance qu'il s'agit d'une vision d'horreur et une aberration historique. C'est pourtant un courant artistique et architectural admiré et reconnu dans le monde entier. La polémique a offert au Bauhaus un coup de projecteur inattendu et les visiteurs se pressent sur les lieux emblématiques du Bauhaus classés au patrimoine culturel mondial de l’Unesco.